Sabine Noël avait 14 ans en mai 1968. Elle est bibliothécaire aujourd'hui.
"Je vivais à Dakar. Mon père travaillait à l'ambassade de France. Je me souviens d'une semaine, peut-être plus, peut-être moins, où nous avons été cloîtrés à la maison. Le couvre feu. L'inquiétude des parents. Un matin, je regarde par la fenêtre malgré l'interdiction. Je vois passer dans l'avenue des camions à la suite des uns des autres. A l'arrière des hommes debout, hilares, tenant des armes. Dans mon souvenir, elles sont à la fois rudimentaires et sauvages. On m'explique que le président a fait venir de la brousse des renforts. Pour contrer les étudiants et travailleurs sénégalais qui protestent.
Le grand Senghor, bousculé, décide alors, sagement, d'effectuer des réformes et de partager le pouvoir. Ce fut, je crois, légèrement "inquiétant", mais assez rapide.
Très vite, la vie normale reprend. Je me souviens de ma sœur aînée, en robe de mousseline rose à nœud de velours noir sous la poitrine, et coiffure "Sheila", se préparant pour le bal des sous-off' en rade de Dakar qui étaient vêtus de blancs, de la tête aux pieds.
Et mon arachide (à la place du petit pois français) qui tentait vainement de pousser entre deux bouts de coton blanc, pour le prof de science nat', sur le rebord de la fenêtre, en plein soleil et sous l'appareil de clim", bruyant et dégoulinant."
Blanche Dinnedoti
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